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et pourquoi ne pas le dire ?
12 novembre 2011

Le mendiant (petit conte d'avant Noël)

Il s'était levé tôt. Il avait choisi avec soin ses vêtements. Il y avait si longtemps qu'il ne s'habillait plus ainsi pour aller au travail !. Il avait rejoint la gare. Il avait pris le premier train pour Paris. Il avait fait tout cela en cachette de sa femme pour lui faire une surprise s'il revenait heureux et ne pas la décevoir, sinon.

Dans un couloir du métro, un homme, une pancarte : "Je suis mendiant. Je ne vous raconterai pas d'histoire. Je ne sais jouer d'aucun instrument. Personne ne veut me faire travailler et j'ai trop peu de compétences. Je vous offre simplement, ma présence et mes remerciements.". Le message l'avait touché. Il avait pris un gros billet, pour s'offrir un bon repas... si on l'invitait pas à déjeuner. Il décida de le remettre à cet homme en remerciant le ciel de l'argent qui ne lui manquait pas (ou pas trop !).

Puis il entra dans l'immeuble. Il fut reçu par une jolie secrétaire avec un des ces gentils sourires qu'il aimait par dessus tout. On l'introduisit avec respect dans le bureau du consultant.

" Bonjour monsieur Z" lui dit-il. "J'ai lu avec intérêt votre cv. J'ai lu votre lettre de motivation comme on lit une nouvelle. Tout indique que vous semblez exactement correspondre à ce que nous attendons pour ce poste. Vous allez d'abord rencontrer tous ceux qui sont impliqués dans votre recrutement, puis je vous verrai en fin de journée."

Quatre personnes. Quatre entretiens, tous plus riches les uns que les autres. L'un des hommes qui l'interrogeait lui dit même :' C'est curieux vous avez le même nom qu'un homme que j'admire et dont je possède tous les ouvrages. C'est un des précurseurs de notre discipline et je me suis toujours demandé à quoi il ressemblait.". Il avait répondu avec un petit sourire. "Vous savez : mon nom et mon prénom sont assez communs. Il n'est pas étrange que vous les ayez déjà entendus."

Il fut invité à déjeuner dans la salle à manger spéciale du président qui voulut qu'il déjeunât à sa table. Au passage l'homme se dit qu'il avait bien fait de donner ce billet à ce mendiant. Il n'en aurait pas eu besoin.

Toute la journée se passa ainsi. A la fin, le même consultant le reçut. Il lui dit que tous étaient unanimes :Il était retenu. Il lui fit rappeler ses prétentions de salaire. Il eut l'air surpris qu'elles fussent si faibles. Il lui présenta tous les avantages de la société comme pour le retenir de ne pas être tenté ailleurs. Puis il le raccompagna.

L'homme était content. Non que sa vie lui déplût. Les travaux qu'il faisait chaque jour, s'ils ne correspondaient pas du tout à sa formation, étaient une source quotidienne, de petites joies, de petites réussites, de petites humiliations, de petits échecs et surtout de contacts chaleureux. Il mettait ses mains au service du beau et avait fait son métier de ce qu'il faisait autrefois pour son seul plaisir. Mais il était heureux de retrouver un peu le chemin de la prospérité et il imaginait que quelques années dans cette compagnie allaient l'aider à faire face à quelques dettes un peu trop lourdes aujourd'hui.

Il n'était pas du tout dans l'esprit de "Perette et de son pot au lait" mais il se prit à imaginer de nouveaux plaisirs. Il reprit le métro. Il  recroisa le mendiant qui lui offrit son plus beau sourire. Il l'avait reconnu. Un échange de regards amicaux.

Il avait quelques heures d'attente. Le train qu'il avait choisi était bon marché ...et tardif. La salle d'attente était bondée. Il résolu de sortir et d'aller voir les vitrines des grands magasins voisins. Noël approchait et ces boutiques étaient souvent un bonheur pour les yeux. Il découvrait. Il admirait le savoir-faire des décorateurs et la beauté des objets.

Puis il fut fatigué et décida de s'asseoir sur un banc vide, en face de la porte de laquelle ressortaient des foules de personnes chargées de paquets. Il s'endormit : Il s'endormait avec la grande facilité des hommes qui ont le coeur pur et qui n'ont pas la crainte de ceux qui les entourent.

Il était assez élégamment vêtu. La coupe de ses vêtements trahissait le bon faiseur mais ils avaient un petit air désuet qui indiquaient qu'ils étaient au repos depuis quelques années. Il avait avec lui depuis toujours un grand béret basque qu'il sortait quand il faisait trop froid. Il aimait ce côté paysan et insolite et voulait marquer ainsi son attachement à ses origines terriennes. Il l'avait sorti de sa poche et l'avait posé à côté de lui.

Une première dame passa. Elle vit l'homme endormi. Elle vit le béret. Elle jeta une pièce. Les autres qui suivaient firent de même et crurent tous à un mendiant tant il est rare dans ces grandes villes de voir des hommes arrêtes sur un banc autrement que pour mendier. Il n'entendit aucune des remarques dégradantes ou méprisantes qui hélas existent aussi. Il dormit plusieurs heures. La manège n'arrétait pas et ne le dérangeât même pas.

Il se réveilla, reposé.Son téléphone avait vibré dans sa poche. Une femme au téléphone. Une secrétaire, empêtrée dans le message qu'il fallait qu'elle délivre. Il imagina la réceptionniste si agréable.

"Monsieur Z. Une grave méprise... Une erreur sur votre âge... Nous n'avions pas bien lu... La politique de la maison...Pas d'embauche au-delà de quarante ans...désolée." Il remercia. Il rassura. Il fit comprendre à cette jeune femme qu'il savait bien qu'elle était étrangère à cette décision et la remercia avec tellement de douceur qu'elle en fut émue. Il fut déçu et même triste. Cela ne dura pas. Il n'aurait pas voulu travailler dans une société ou les puissants annoncent les bonnes nouvelles en laissant aux petits la charge d'annoncer les mauvaises. Il ne regretta pas un seul instant son billet du matin. Il ne regretta pas nos plus de n'avoir pas prévenu les siens.

Le soir s'était avancé et le magasin était fermé. La rue était plus calme.Il eut froid. Il chercha son béret. Il le trouva lourd, très lourd. Il était plein d'argent, des pièces mais aussi des billets, parfois très gros. Il ne comprenait pas le pourquoi de cet argent. Il compta. Il fut édifié. Il y avait au centime près cent fois plus d'argent que le billet qu'il avait remis au mendiant le matin. De quoi fêter dignement cette journée.

Puis il comprit. Il éclata de rire. Le rire, le plus beau et le plus doux des remèdes contre le mal du temps.

Il rentra chez lui. Ne dit rien à personne. Il reprit son travail avec sagesse.Le lendemain, il dit à sa femme qu'il aimerait qu'ils aillent passer un week-end à Paris, qu'il avait pour cela fait quelques économies. Et, lorqu'ils y prirent leur premier repas. Il commença par : " Il faut que je te raconte une histoire. Tu auras peut-être du mal à y croire !..."

Mais vous amis lecteurs, je sais que vous  croirez à ce conte, autant que cela vous sera nécessaire ou bénéfique, ou peut-être les deux. Merci de l'avoir lu. Passez une bonne journée.

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Commentaires
G
c'est un très joli conte un peu trop beau pour être vrai...mais quelquefois c'est l'invraisemblable qui arrive et il faut avoir le coeur ouvert pour l'accueillir
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H
Moins lectrice, moins blgogueuse, mais là je ne résiste pas, merci pour joli compte avant d'aller dormir !
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B
Simplement merci... un beau conte mais, et si c'était vrai?
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C
Il faut se laisser emporter par les histoires, quel intérêt sinon?.... Merci pour ce très joli conte!
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A
Il y a les lignes pour y croire, les lignes pour rêver, les lignes que j'aimerais effacer parce qu'elles sont tristes.<br /> Je crois à toutes les histoires qu'on me raconte. Pourtant, Jacques, vous prévenez, celle-ci est un conte...
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et pourquoi ne pas le dire ?
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