Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
et pourquoi ne pas le dire ?
15 janvier 2013

Le petit homme en rose

Le petit homme en rose s'est levé ce matin. Tôt, trop tôt pour un dimanche. Il a fallu changer ses habitudes. Pas de croissant. Pas la douceur d'un dimanche de repos. Doucement il l'a réveillée. Il ont pris leur voiture et sont allés prendre  le train. Le petit homme n'est pas riche en cette période d'après fêtes. Il n'est pas riche et c'est la crise et le travail qui ne vient pas. Le petit homme se serait bien passé de cette grosse dépense. Il est parti du fond de sa Provence pour aller à Paris.

Le petit homme dans le train a retrouvé plein de têtes connues : ça ne l'étonne pas mais ça lui fait plaisir de voir que ses amis ont pensé comme lui. Il a aussi vu de nombreuses têtes inconnues mais des signes extérieurs de manif : les banderoles, le sac a dos, l'excitation joyeuse de l'innattendu. Et il s'est encore plus réjoui. Il s'est dit : "Alors, nous ne serons pas seuls et nous serons nombreux. si ceux qui viennent du plus loin de la France sont là, ils seront encore plus nombreux les voisins de la capitale.".

Il a voyagé encore dans le repos et le silence. Dès la gare des sourires et des tee-shirts jaunes : des jeunes gens nombreux qui leur disent où aller et qui leur distribuent conseils et consignes : c'est vrai que chez ces gens là, on ne défile pas. La plupart du temps, on supporte et on serre les dents.

Il est déjà un peu tard. Il faut filer place d'Italie. La place est pleine mais le square du centre est interdit et pas un ne tente de franchir l'interdit. On se bouscule un peu. On s'excuse. On a froid. On cherche les pancartes indiquant des amis. Il y a trop de monde on ne les voit pas. Il acheté un tee-shirt rose ou un papa et une maman stylisés tiennent pas la main leurs enfants. Il n'aime pas trop. Il sait que ses enfants et ses amis riront de le voir ainsi accoutré. On le maquille : il aime encore moins... mais bon !  le petit homme est obéissant et il veut que tout soit réussite.

Il regarde autour de lui. Tous les âges. Comme si on avait prélevé un "échantillon représentatif de la population". Il se souvient du temps où il jonglait avec les chiffres, avec les statistiques. Il compte, il recompte, il regarde, il mesure. Il se souvient d'autres moments où ils furent 200 000, 500 000, 1 million. Il se dit : "il y en a encore plus. il faudra que je me renseigne.". Il ne voit pas d'opposants. Il est content. il n'aime pas la violence. Il est content qu'on ait compris que ce n'est pas contre "eux" qu'ils en ont.

"Eux", il en connaît. Il sait que ce sont des enfants, des hommes, des femmes qui ont une histoire qu'il respecte, même s'il ne croit pas que ce soit bon. Même s'il sait qu'il n'y en a pas tant qu'on veut bien le faire croire. Il a vu des pères, des mères souffrir de voir leurs enfants ainsi devenus.  Il sait qu'en l'occurence, il ne sont que le jeu d'un chantage. On se sert d'eux, on les instrumentalise pour faire diversion, pour faire oublier qu'on est incapable de gérer le pays, pour satisfaire des lobbys, des postes, des pourcentages. "Eux", il les respecte et ils les aime et il ne supporte pas qu'on en parle comme un groupe, comme si chacun d'eux n'avait pas sa propre existence.

Il stationne. Au début, on sourit. Puis on sort un pull, des gants, un bonnet. Il fait froid à Paris. On attendra deux heures avant de pouvoir partir à son tour et lorsque les derniers partiront, les premiers auront déjà quitté le Champ de Mars. Un visage connu, au loin. Des appels téléphoniques. il y a là des frères, des neveux, des amis. On ne se verra pas ou rarement. Ce sera pour une autre fois.

"Essaie de savoir où est B..". B..c'est leur fils. Il est venu seul." Je suis parti dans les premiers. Je vous attends aux Gobelins." Puis :"Je vous attend à Montparnasse". il faudra trois heures avant de le retrouver. Sur le chemin ils rencontrent les parents de leur gendre, venus de l'autre bout de la France. on est content. On se voit peu. On s'apprécie. On se partage les mêmes enfants, les mêmes petits enfants, les mêmes souvenirs. On se dit qu'on devrait se voir plus souvent.

On marche et on marche encore. Pas de débordement. Des chars et des chants joyeux. Il trouve que c'est un peu bruyant mais il est content de cette ambiance de fête malgré le froid et la fatigue. Sur les chars,des jeunes gens joyeux,  des mariés et des mariannes, tous plus beaux les uns que les autres. Ils ont en pourtant lancé des alertes, des menaces, de quoi décourager les plus hésitants. Mais ça n'a pas marché. Tant mieux !

Les CRS sur les côtés les regardent avec sympathie. Ce n'est pas tous les jours qu'on gère ce genre de manifestations. On marche et on marche encore. La foule est  si compacte qu'on ne sait pas où on est. Tiens ! on nous compte. Tant mieux on saura les vrais chiffres, pas ceux inventés par des journalistes complaisants et trop attentifs à conserver leur place. Décidemment il aime les chiffres. Il se demande parfois pourquoi il les a quittés pour travailler de ses mains.
Un peu plus loin une quête. On donne généreusement. Ce n'est pas là une de ces manifestations aidées par des pouvoirs bienveillants. Mais le risque est trop grand. Tant pis si on en est de sa poche.

Ils sont devenus fous. Ils veulent même remettre en cause les principes de notre société, de la république. On ne construit pas des enfants comme on construit des maisons. Ou plutôt si, avec sagesse, avec patience, sur le roc et non sur le sable. Mais là ce n'est pas vrai, c'est uniquement diversion. Satisfaire les fantasmes des intégristes d'une pseudo liberté. Effondrer les bases de ce pays qu'il aime.

Là, une pancarte invitant l'instigateur de la loi à se marier lui-même avant de le proposer aux autres. Amusant et vrai. Ceux qui poussent cette loi, n'ont cure de l'appliquer à eux-mêmes. Alors pourquoi ?

Ils arrivent enfin au Champ de Mars. Les premiers sont déjà partis. Les derniers n'arriveront que dans deux heures. Un podium. De la joie, des chants, des sketches... et des rires. Et pourtant il pleut. Il faut déjà repartir, reprendre un métro puis un train. On prend le temps d'un café avec des amis retrouvés. A la table de derrière un couple de femmes s'embrassent à pleine bouche : la seule provocation qu'on aura vue. Personne ne réagit. Elles s'arrêtent. Pourtant elles sont touchantes et bien jolies. Un air bien "comme il faut" aurait dit sa grand-mère.

On retrouve la gare. L'attente permet de revoir quelques amis, fatigués eux aussi. Mais on parle. On commente. "On était trop nombreux. Ils ne peuvent pas passer à côté" disent les plus optimistes. "On verra" Dit le petit homme en rose. Il sait que ce sont des menteurs et des manipulateurs. Qu'ils tiennent de nombreux journalistes en otage. Que ne ferait-on pas pour une bonne place ?
Il sait aussi que c'est une des rares promesses qu'ils pourront tenir parce qu'elle ne coûte rien.

Mais le petit homme en rose se dit qu'il a connu un gouvernement encore plus établi qui s'est ainsi écroulé devant la rue remplie de petits hommes en rose. Et il sait que demain est promis à celui qui espère.

Déjà le train. Le sommeil qui le reprend. A côté d'eux, un couple de jeunes hommes. Ils ont passé le week-end à Disney. Ils se racontent. Ce sont encore des enfants ou presque. Ils n'en ont cure de cette loi. "Qu'on leur foute la paix ". C'est tout ce qu'ils désirent. Ils ne savent pas qui sont ces gens qui sont à côté d'eux. Et chacun s'endort.

Demain sera demain. Et le travail et l'attente. Le petit homme sera fatigué mais quelque part heureux de ce sentiment étrange et bienfaisant d'avoir fait ce qu'il devait faire.

Il lui reste à remercier ses lecteurs d'avoir eu la patience de le lire. Peut-être certains d'entre eux ont-ils marché à ses cotés. Lui, il est patient. Il reviendra autant de fois qu'il le faudra. Jusqu'à ce que raison revienne.

Bonne journée.

Publicité
Publicité
Commentaires
F
Même si je ne suis pas d'accord avec ce texte, jamais il n'a été autant en accord avec le nom de ton blog; et pourquoi ne pas le dire?<br /> <br /> Et pour cela je te félicite et je t'applaudis des deux mains...<br /> <br /> Merci pour ce témoignage honnête...
Répondre
H
J'étais dans la foule aussi parmi tant de personnes souriantes, calmes, respectueuses. Je venais dire ce que je crois juste, sans haine ni jugement des autres.<br /> <br /> Je l'ai dit à des amis. Je croyais avoir des amis de tous bords, de toutes couleurs, de presque toutes convictions. Depuis, j''en ai vu beaucoup se moquer, brandir de vilains qualificatifs, menacer... Il n'y a pas que les "riches" qu'on n'aime pas. "Ah oui, c'est vrai, tu es catho" (moi, je croyais que j'en étais une bien mauvaise pourtant) avec tant de mépris dans la voix. J'ai perdu des amis, enfin, ils n'en étaient pas, mais çà fait mal de le savoir. Tant pis, cela ne me fera pas renoncer.
Répondre
A
Cher Jacques, <br /> <br /> Mon impulsion première était de réagir à ce "Eux", auxquels vous consacrez un paragraphe de votre texte. Texte qui se veut plein de tolérance, je l'ai bien compris, car profondément, vous aimez les Hommes. <br /> <br /> Nous organisons ce soir un débat sur ce thème du "Mariage pour tous, adoption, filiation", dans un café de la ville. Ceci dans le cadre de soirées intitulées Bistrot et Bible, où nous abordons des questions de société aux implications personnelles qui peuvent faire sens dans nos vies, partage de nos réactions et de nos questions sans à-priori ni préjugés. C'est un exercice parfois difficile !<br /> <br /> Je constate combien il est nécessaire et bénéfique de s'informer, encore et encore. D'entendre différents points de vue, discerner les confusions et amalgames qui nuisent à tous. Modifier sa vision des choses n'est pas signe de manque de personnalité, c'est parfois le résultat d'une réflexion qui mûrit.<br /> <br /> La parole respectueuse, l'écoute des différences, la bienveillance sont à mettre en oeuvre pour grandir en société. Je crois que vous pratiquez tout cela, j'aimerais pouvoir en parler !
Répondre
M
Et là-bas, de l'autre côté du monde, il existe des couleurs étranges qu'aucune palette de peintre ne saura jamais reproduire. Et des sentiments qui déjouent les lois de l'équilibre...et les simples visions humaines.
Répondre
H
iNDEED Cathy. <br /> <br /> ce que je CROIS c'est qu'un enfant a besoin d'une vraie dualité pour se construire, donc de deux parents, pas qu'une mère, pas qu'un père, car si on est séparés c'est aussi possible , en mettant de côté les griefs pour le bien être de l'enfant, surtout pas par un "pèremère", parent unique . Un enfant a ce besoin de se contruire dans cette double relation , comme il a deux jambes , deux bras , indépendants l'un de l'autre. Un enfant a le droit d'êter élevé par deux personnes pleinement conscientes de l'importance de leur mission, dans le respect des droits de l'enfant .
Répondre
et pourquoi ne pas le dire ?
Publicité
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 240 172
Archives
Derniers commentaires
Publicité