22 avril 2016
Lettre à une famille de merles.
Chère madame Merlette, cher monsieur Merle,
J'ai bien compris votre manœuvre d'apprivoisement. Vous êtes revenus comme à chaque printemps sans que je puisse déterminer où vous nichiez cet hiver. Pourtant les arbres ne sont pas nombreux : le lilas, l'olivier et le gros mûrier de Chine. Vous avez attendu que je chasse avec détermination tous les chats qui s'approprient mon petit jardin et qui, l'an dernier, avaient signé l'arrêt de mort de plusieurs de vos petits à l'âge des premiers vols. Vous avez attendu que je remette de l'ordre dans cet espace, que je nettoie, que je range.
Alors vous m'avez fait comprendre que c'était bien. Vous êtes venus un peu, puis encore un peu plus, vous rapprochant un peu plus de moi, comme pour m'encourager. Alors j'ai tondu, sarclé, bêché et mis à votre portée nombre de brindilles, de vers de terre et de végétaux. Cette corne d'abondance a redoublé vos chants et conforté votre présence. Vous m'avez récompensé. Hier j'ai laissé ouvert le composteur plein de ces gros vers blancs, gras à souhait et de ces délices d'épluchures bien ramollies. Vous avez fait un festin.
Vous m'avez apprivoisé. Vous m'avez peu à peu appris les gestes qui vous font plaisir. Hier il a plu et ce matin, le jardin inondé du soleil qui se lève, a une bien belle allure. Il reprend son rôle après son sommeil d'hiver.
Et j'entends vos chants et ceux de vos amis d'autres races à plumes, mésanges, moineaux et rouge-queues. Il va falloir maintenant que je m'attèle à cette nouvelle tâche qui est de faire revivre les quelques plate-bandes qui font fonction pour moi de jardin potager. Une occasion de retourner une terre riche de vers de terre. Je me donne encore quelques jours. Je veux bien me faire apprivoiser mais je préfère faire durer l'exercice sur le temps.
Et cet été, qui sera beau et chaud, lorsque que mes petits-enfants dont l'un viendra à peine de naître viendront redécouvrir comme chaque année le jardin de leur grand-père, vous serez là, fidèles au rendez-vous. Vous animerez de vos chants leurs " pestacles" et ces heures de bonheurs attendues mettent déjà dans mon cœur une émotion palpable.
Gardez votre mystère, le secret de votre cache d'hiver, le sens de votre si joli langage. J'aime vous savoir là ,fidèles comme de vieux amis qu'on retrouverait chaque année à la même époque. Et l'hiver froid, quand on cherche un peu plus de chaleur on se rapprochant de l'âtre, la seule pensée de votre retour nous aidera à attendre à nouveau le printemps.
Je ne vous dis pas : "Je vous embrasse." Car vous n'approchez jamais à portée de main mais "Je vous aime", petits êtres de plumes noires et brunes qui colorez nos vies.
Et toi ami lecteur, je te souhaite une très belle journée.
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