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et pourquoi ne pas le dire ?
21 mars 2024

Ma chère Marie-Christine,

 

C’est la première et la dernière lettre que je vous écris. J’avais prévu de le faire à l’époque des voeux. J’avais même trouvé le moyen de vous joindre, mais remettant toujours au lendemain, ce mail n’est jamais parti. 
Pourtant je ne veux pas être triste. Je sais que ces dernières années de solitude ont dû être très dures pour vous en l’absence d’Hervé malgré toute l’attention et tous les soins apportés par vos enfants. 
Je ne sais pas si on peut le  dire ça comme ça ….mais j’étais content de vous accompagner hier dans ce dernier voyage. Ce  jour vous aurait plu. Il faisait beau comme il sait faire beau au printemps dans cette Provence que vous avez appris à connaître et à aimer. Toute votre famille était là, belle, solide et digne. Beaucoup de vos amis aussi, de ces amis que vous avez su gagner, tous les deux, au fil du temps. 
Le père abbé avait accepté que la messe conventuelle devint votre messe requiem, un privilège rare. Votre fils officiait dans cette abbaye qu’il connaît bien et je découvris à l’occasion que vous y étiez oblate sous un très beau nom. Je l’ignorais et pourtant nous en avons parlé souvent tous les trois avec Hervé de cette abbaye sans que vous y fassiez allusion. Vous y étiez tous les deux de ces familiers discrets, profitant de la proximité de votre maison.
Pendant les quelques travaux que je fis dans votre maison j’ai eu la chance de partager votre intimité. Nous avons parlé de beaucoup de choses, de nos familles, de politique, de religion et de mille autres sujets… tout à fait politiquement et parfois même religieusement incorrects. Nous avons souvent ri, parfois pesté contre un monde qu’on avait bien du mal à comprendre mais qu’on ne pouvait s’empêcher d’aimer.
Pendant ce temps vous faisiez mille autres choses, gérant la garderie, préparant et congelant des plats pour vos enfants et petits enfants qui vous rejoignaient en vacances. Vous enregistriez même des livres lus pour ceux qui ne pouvaient pas ou plus les lire.
Le monde des familles nombreuses, catholiques et fidèles est un monde merveilleux plein de côtés secrets inconnus de bien des gens. C’est un monde tendre et délicat, plein de petites charités, de peines et de joies souvent discrètes. 
C’est un monde qu’on ne peut pas trop expliquer. Il faut d’abord l’accepter avant de le connaître. Il peut même parfois sembler froid et dur, voir incompréhensible à ceux qui n’y pénètrent pas.
Ce monde, Hervé et vous l’incarniez parfaitement pour moi. Vous avez bien du ressentir combien nous admirions ce couple que vous étiez et cette famille que vous aimiez et que vous accompagniez. 
Devant ce simple et beau tombeau, dans ce cimetière où reposent plusieurs de mes amis,  je pensais à tout ça.  Il restait peu de monde, votre famille,  quelques amis, quelques moines. Je me faisais la remarque que j’étais maintenant de cette génération « en première ligne », un peu des anciens. 
Je refusais la gentille invitation proposée par votre famille, pour rejoindre ma « jeune épouse » qui travaille encore, à l’heure de son repas.
Car s’il est bien une chose que j’ai encore plus appris à votre contact a tous les deux, c’est l’importance de soigner cette complicité de couple.
Je vous dis donc un dernier « au revoir ». Je vous embrasse et vois charge de transmettre à Hervé tout le bien que je pense de lui.
Mais je pense que c’est inutile et qu’il le sait déjà.
Je ne sais pas si ça se dit mais je vous souhaite une belle éternité (bien conscient de pléonasme 😉).
Vos amis, Michèle et Jacques.
 
Du petit livret qui accompagnait l’office je garde cette belle image de vous deux, de dos, regardant ces collines que vous aimiez. C’est une belle image.

 

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